SUR PIBRRB DB L*ESTOILE.                         lj
On a prétendu que la vérité historique se trouvoit plus ordinairement dans les journaux écrits par des particuliers, qui ne les destinoient pas à étre rendus publics, que dans les Mémoires des hommes d'Etat. Les auteurs de ces journaux, ne travaillant pas pour les autres, n'ont sans doute pas pu vouloir se tromper eux-mêmes. Mais s'ils n'ont eu aucun intérêt à dégui­ser la vérité, est-on certain qu'il leur ait été possible de la connoître? Ayant vécu éloignés des affaires, ils ont été réduits à répéter ce qu'ils entendoient dire, sans pouvoir jamais s'assurer de l'exactitude des faits. On sait que, lorsque plusieurs personnes racontent la méme anecdote, elles varient toujours sur les détails ; si cette anecdote court le monde, en passant de bouche en bouche, elle se dénature bientôt au point de n'avoir presque plus aucune ressemblance avec le récit pri­mitif. Les événemens qui touchent à la politique sont, surtout dans les temps de troubles et de factions, bien plus sujets à être dénaturés que les autres : chacun les modifie suivant ses préventions ; on ne se fait méme pas scrupule d'en inventer au besoin; et les contes les plus ridicules, lorsqu'ils flattent les passions, sont ceux qui obtiennent le plus de croyance. Ainsi, en suppo­sant dans l'auteur d'un journal l'impartialité la plus absolue, il donneroit souvent malgré lui des bruits populaires pour des faits avérés, et l'opinion de ceux qu'il fréquente pour l'opinion générale. C'est ce qu'on pourra remarquer dans les Journaux de L'Estoile, avec cette différence que, tout en étant homme de bien, il se laissoit souvent emporter par la passion et par l'esprit de parti. Il avoit en politique et en matière de religion des idées indépendantes, qui étoient celles 45. '                                                a
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